(...) Il est rare qu’un peintre jeune ait conscience de ce désir qui croit avec le sentiment d’inachèvement que procure le développement progressif de l’oeuvre. C’est peut-être ce qu’il y a de plus frappant chez Cartier que cette exigence de la délivrance, exigence d’autant plus troublante qu’elle s’exprime aussi bien sur les toiles que dans les commentaires ou digressions.
Ce qui retient immédiatement dans son oeuvre, c’est sa parfaite cohérence, qui se traduit par une continuité remarquable dans les sujets, les formes et les couleurs. Nulle effervescence chaotique, nulle duplication stérile dans ces intérieurs d’ombre où luisent faiblement tables, chaises et miroirs obliques. La force de l’ensemble est elle qu’on néglige souvent la variété de la palette : au-delà du bleu, il y a nombre bleus, puis nombre verts et, forcement, jaunes, rouges Simplement, les stridences sont évitées, ce qui correspond à un art dont l’anecdote est bannie. A l’évidence, la force de cette peinture émane de son recueillement, silence des formes, silence des couleurs...
(...) Et l’histoire de ces tableaux n’est probablement autre que la persistance incompréhensible de la vie dans un monde familier mais terriblement silencieux. Le monde qui est sien, Cartier sait qu’il doit le peindre jusqu’au moment où la cohérence de sa peinture révélera l’ordre de son monde en un tableau qui n’en appellerait plus d’autre. (...)

Jacques NORIGEON, 1989



(...) A celui qui observe partout dans l’art contemporain le recours aux solutions de facilité, la peinture de Christophe Cartier offre le sentiment réconfortant de découvrir une sorte de pôle de résistance au laisser-aller ambiant. " Seuls les hommes malades peuvent être artistes, disait Bram Van Velde. C’est que leur souffrance les pousse à faire des choses qui redonnent un sens au monde. L’homme sensible ou artiste ne peut qu’être un malade dans notre vie civilisée pleine de mensonges. " L’art compris comme métier, quelle horreur ! "La peinture, c’est l’homme devant sa débâcle."
C’est un fait: les oeuvres qui nous donnent le sentiment de la beauté " à commencer par celles de Bram Van Velde lui même " sont souvent filles du désespoir, mais ne portent en elles aucune trace de blessure, au contraire. Les tableaux de Christophe Cartier sont de cette sorte. Peu importe qu’au départ il y ait tel ou tel motif figuratif (table, chaise, ou miroir). Peu importe que l’artiste travaille " maigre sur gras " contrairement aux règles enseignées à l’Ecole (il lui arrive de passer du fusain sur la toile puis de revenir par dessus avec de la peinture, mais dit-il, “je m’arrange. Celà tient...”). Ce qui est essentiel, c’est qu’un jeune peintre d’aujourd’hui ait retrouvé les chemins d’un art de recherche lente échappant aux futilités et aux pesanteurs du monde. Bram s’émerveillait que son rêve puisse vivre dans ce qu’il nommait l’horreur du monde. Je m’émerveille quant à moi que la peinture de Christophe Cartier ait pu éclore au beau milieu des ressassements dits post-modernistes. Ces bleus et ces verts, ordonnés au prix d’une souffrance vraie, ne serait-ce pas des lumières venues briller dans la nuit de notre débâcle ?

Jean-Luc CHALUMEAU, Septembre 1988



Élargissant sa recherche picturale dans des lieux clos, Christophe Cartier possède l’étrange pouvoir d’affiner notre perception. La chaise, le miroir, le crabe, le corps que la peinture de Cartier fait surgir vers nous ne sont après tout que des objets. Il est probable que cette chaise soit celle de son atelier, que ce miroir reflète notre image, il est aussi probable que ce corps " aperçu " soit celui d’un être de chair et de sang. En un mot la peinture est un objet probable et non un rêve d’objets. L’univers que nous montre Cartier (sa peinture) constitue un tout organisé qui est un regard (le sien) proposé à la perception (la nôtre). (...)

(...) Nous ne pouvons nous perdre dans ce monde clos, serré et pourtant nous ne pouvons en ressortir qu’hébétés. Cette peinture nous saisit le regard. Grâce à ses retournements imprévus, à ses éclairages subits, la peinture de Cartier nous trouble ; elle nous fait aimer notre regard.

Claire NEDELLEC, Décembre 1986



Christophe Cartier 1989 Christophe Cartier 1989 Christophe Cartier 1989 Christophe Cartier 1989 Christophe Cartier 1989
"chaises", 1989,
technique mixte sur toile,
130 cm X 97 cm
"deux chaises", 1989,
technique mixte sur toile,
130 cm X 97 cm
"chaise", 1989,
technique mixte sur toile,
195 cm X 97 cm
"chaise", 1989,
technique mixte sur toile,
195 cm X 97 cm
"chaise", 1989,
technique mixte sur toile,
195 cm X 97 cm
Christophe Cartier 1988 Christophe Cartier 1988 Christophe Cartier 1987 Christophe Cartier 1986 Christophe Cartier 1986
"sans titre", 1988,
technique mixte sur toile,
195 cm X 130 cm
"sans titre", 1988,
technique mixte sur toile,
195 cm X 130 cm
"sans titre", 1987,
technique mixte sur toile,
195 cm X 130 cm
"crabe dans un miroir", 1986,
technique mixte sur toile,
195 cm X 130 cm
"accalmie 1", 1986,
technique mixte sur toile,
130 cm X 97 cm
Christophe Cartier 1986 Christophe Cartier 1986 Christophe Cartier 1986 Christophe Cartier 1985 Christophe Cartier 1985
"quelques tabourets", 1986,
technique mixte sur toile,
195 cm X 130 cm
"trois tabourets", 1986,
technique mixte sur toile,
195 cm X 130 cm
"trois tabourets, ...", 1986,
technique mixte sur toile,
195 cm X 130 cm
"atelier au radiateur", 1985,
technique mixte sur toile,
195 cm X 130 cm
"mon atelier", 1985,
technique mixte sur toile,
195 cm X 130 cm
Christophe Cartier 1985 Christophe Cartier 1985 Christophe Cartier 1985
"seul à l'atelier", 1985,
technique mixte sur toile,
195 cm X 390 cm
"trois poissons", 1985,
technique mixte sur toile,
130 cm X 195 cm
"sans titre", 1985,
technique mixte sur toile,
97 cm X 130 cm